Bibouk, chienne femelle Berger des mascareignes âgée de 16 ans et pesant 10kg, est présentée en urgences à la clinique vétérinaire du Front de mer à la suite à un AVP (Accident de la Voie Publique).
Lors de son arrivée, Bibouk présente un scalp cutané sur toute la zone dorso-lombaire avec une suspicion de dévascularisation tissulaire. En plus de cela, de nombreuses plaies d’abrasion sont mise en évidence sur ses membres postérieurs.
L’examen clinique de Bibouk relève une hyperthermie à T=39,8°C, de la déshydratation, un état de choc et des signes de douleur, le reste de l’examen est dans les normes
Prise en charge
L’état de choc de Bibouk a été stabilisé grâce à de la fluidothérapie, une antibiothérapie (Amoxicilline + acide clavulanique), une injection de Meloxicam. Un traitement analgesique a été mis en place pour contrôler la douleur ( Elle a d’abord reçu des opiodes puissants (Méthadone) puis remplacé par de la Buprénorphine et du Butorphanol lorsque les plaies étaient moins douloureuses). Un premier nettoyage de la plaie à lieu.
La radio révèle une fracture esquilleuse de l’ilium, très près de l’acetabulum gauche. Au vu de l’âge de l’animal, et du fait qu’il ne présente pas de difficulté à marcher, la fracture ne sera pas traitée chirurgicalement.
Radiographie du bassin
Fracture muti-esquilleuse de l’ilium droit
Traitement chirurgical
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Complications
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Durant son hospitalisation, 2 problèmes majeurs surviennent :
* Tout d’abord une anorexie, Après un contrôle échographique qui ne révèle pas de lésion interne, une sonde de réalimentation naso-oesphagienne est mise en place pour réaliser des gavages journaliers.
Le 2ème problème est un début de nécrose sur certaines parties du lambeau de peau qui a été utilisé afin de fermer la plaie, avec une sécrétion de pus. Bibouk repasse donc en chirurgie 5 jours après la première intervention, afin d’effectuer un parage de la peau morte, un re-nettoyage des plaies et un retrait des drains aspiratifs qui seront remplacés par un drain passif. La guérison de la plaie se fera donc par seconde intention, avec des changements de pansements, un traitement de la zone (Lavage + miel) et des séances lasers.
Evolution clinique
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Durant les prochains jours d’hospitalisation, un tissu de granulation sain se met en place au niveau de la plaie, signe que la peau est entrain de guérir . Mais malheureusement Bibouk semple abattu et une persistance de son anorexie est accompagnée d’une perte de poids de presque 2kg depuis son arrivée. C’est pourquoi un essai de retour à la maison est donc mis en place après 9 jours d’hospitalisation, afin de voir si son état général s’améliorer dans un environnement plus familier. Elle revient à a clinique toutes les 48h afin de changer son bandage et administrer les traitements nécessaires sur sa plaie.
Le retour à la maison semble redonner vie à Bibouk qui reprends de l’appétit et qui se promène dans toute la maison. On profite donc du prochain changement de pansement à la clinique afin de remplacer sa sonde naso-gastrique par une sonde œsophagienne, pour faciliter les gavages effectués à présent par la propriétaire. Gavage qui sera nécéssaire malgré le retour de l’appétit de Bibouk car son poids va passer de 10kg à son arrivée, à 8,300 kg 15 jours plus tard puis à son poids le plus bas de 7,300kg 19 jours plus tard pour enfin se stabiliser à 7,5 kg.
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Scalp cutané important suite à l’accident de la voie puplique.
Post op immédiat
Suture de la plaie par un lambeau viable. Pose de drains aspiratifs.
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Début de nécrose de la partie non viable du lambeau
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Plaie en granulation.
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Cicatrisation de la plaie. Début d’épithéliallisation
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Cicatrisation de la plaie.
Focus sur le traitement des paies
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Une plaie peut être traitée de 2 manières :
- Soit par 1er intention c’est-à-dire lorsque l’on va rapprocher les bords de la plaie avec du fil de suture ou des agrafes afin de fermer celle-ci, permettant une cicatrisation plus rapide et une réduction du risque d’infections.
- Soit par 2ème intention, lors d’une déhiscence de plaie (comme le cas de Bibouk) ou lorsqu’une plaie est trop grande avec une quantité de peau disponible réduite. Dans ce cas, il faudra s’occuper la plaie avec des multiples bandages et des traitements locaux en attendant que le processus de cicatrisation se mettes en place.
Ce processus de cicatrisation comprend plusieurs étapes qui se chevauchent :
- Tout d’abord nous avons une phase inflammatoire et de débridement qui apparait directement après le trauma et qui dures 3-5 jours. Durant cette étape une vasoconstriction des vaisseaux lésés va limiter l’hémorragie, pendant qu’une vasodilatation des autres vaisseaux va permettre l’arrivée de cellules et de fluides dans la plaie (Leucocytes, PMN, Macrophages, Plaquettes) afin de former un caillot et de protéger la plaie d’une possible infection.
- Viens ensuite la phase de réparation (3-5 jours post trauma) avec le tissu de granulation, tissu formé par les fibroblastes, le collagène et les capillaires sanguins. Ce tissu est rouge et très hémorragique, il est plus résistant aux infections, il joue un rôle dans la contraction de la plaie et il permet la mise en place de l’épithélialisation (Pas de granulation -> Pas d’épithélialisation).
- L’épithélialisation (4-5 jours post trauma) est une mobilisation, une migration puis une prolifération des cellules épithéliales du bord vers le centre de la plaie. Lorsqu’une plaie cicatrise à l’air libre, une croûte se mets en place et tombera d’elle-même car les cellules épithéliales migrent sous la croûte et la séparent de la surface de la palie. Mais ce n’est pas une technique recommandée, c’est pourquoi on essaie de garder la plaie humide en permanence avec des bandages.
- La phase de contraction (5-9 jours post trauma) est grâce aux myofibroblastes. La contraction de ces derniers permet à la peau de se contracter, rétrécissant ainsi la plaie en ça périphérie et permettant ventuellement la fermeture complète de la plaie.
- Finalement la phase de maturation (3 semaines post trauma) qui peut durer des mois, voire des années en fonction de l’animal. Lors de celle-ci, le tissu réépithélialisé va maturer, avec la réorientation et la maturation des fibres de collagène, permettant un épaississement de la nouvelle peau.
Article rédigé par PASCALE DE CARVALHO Matias, étudiant en dernière année en médécine vétérinaire à l’université de Liège. Stage de 6 semaines de fin d’étude réalisé en octobre 2023.